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L'actualité d'Emma Gesquière
28 décembre 2013

Les ruses de Jack !

Happy_Halloween_Jack_O_Lantern_by_GENZOMAN

Voici un texte que j'ai écris pour Halloween !

 

Lecteur, toi qui viens d’ouvrir ce livre en toute innocence pour agrémenter ta soirée par un petit conte, es-tu certain de vouloir entendre l’histoire qui va suivre ? de Jack O' Lanternes. Je constate que tu ne rebrousse pas chemin. Alors, considère-toi comme averti et que le récit commence!

Il y a très, très longtemps, en Irlande, un prénommé Jack vivait dans un petit bourg perdu entre landes et monts. Maréchal-ferrant de jour, la nuit, il n'y avait pas plus fidèle disciple que lui de tous les alcools que produisait cette terre fouettée par les vents marins. Après son labeur, avant de regagner sa tanière, il était coutumier des auberges comme les rats le sont des égouts. Jamais, il n'était rentré chez lui sans d'abord avoir roulé sous la table. Les mois et les années passant, le travail se raréfiant et la soif ne s’étanchant jamais, son porte-monnaie, lui, connaissait le sort inverse. 
Ce soir, comme à l'accoutumée et ce depuis qu’apprenti il avait touché sa première solde, Jack poussa la porte d’une auberge aussi sale que sombre ; il s'assit à une table reculée. Se sachant désormais ruiné mais têtu et fier comme tous les Irlandais, notre homme commanda pourtant un verre du plus mauvais whisky, un breuvage que personne à part lui n’arrivait à ingurgiter. Comme tous les soirs, un individu dont, au vu de son costume impeccable, la place n’était pas dans ce trou à rat, prit place à ses côtés et engagea la conversation pour la énième fois. Si notre maréchal-ferrant l’avait toujours ignoré, sa situation financière du moment et son intuition lui murmurèrent de le prendre en considération et d’entamer un dialogue. Jack, malgré son état d’ébriété, n’en perdait pas sa malice pour autant.

— Bonsoir, l’ami ! Enfin, vous daignez me parler ! l’apostropha le dandy.
— Y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ! marmonna Jack entre deux gorgées de son mauvais malt.
— Sais-tu à qui tu parles, vieil ivrogne ? ricana l’inconnu.
— Aucune idée mais sûrement à quelqu’un de bien plus riche que moi ! 
— Pour sûr, gredin ! Et tu n’imagines même pas à la tête de quelle fortune je suis, Jack ! 
— Comment connaissez-vous mon nom ? s’étonna le maréchal-ferrant.

L’individu éclata de rire, un rire grave et aux mille échos.

— Tu serais bien étonné d’apprendre tout ce que je sais, mon ami. Par exemple, je peux te dire que tu ne pourras pas payer l’exécrable mixture que tu ingurgites parce que ta bourse est à sec. 
— Mais …, s’engouffra Jack qui venait de prendre une gorgée de sa piquette.
— Ce n’est pas le moment de mourir, fripouille, plaisanta l’inconnu. Pas au moment où ton destin s’apprête à changer … si tu le désires, évidemment, continua l’homme sur un ton toujours moqueur.
— Qui êtes-vous, pour l’amour de Dieu ?
— Ah non ! Là, tu viens de m’insulter. Moi, je suis son ennemi juré ! Je me présente : Samaël, pour te servir !
— Sa…quoi ? s’étouffa Jack. M’prenez pour un demeuré ou quoi ?
— Je m’y attendais ! C’est toujours le même effet quand je me présente. Si je te dis Lucifer, c’est plus clair ? Non, ne dis rien et écoute. J’ai un marché à te proposer, une offre qui ne se présente qu’une fois dans la vie et qu’on ne refuse que rarement. 

Jack, même éméché, n’avait en rien perdu sa vivacité d’esprit et en quelques seconde évalua ce que représentait cette offre, ce qu’elle allait lui coûter et comment l’accepter en sortant triomphant de ce guet-apens. 

— Admettons, répondit le maréchal –ferrant. Faites-moi donc cette offre et nous verrons si elle est à la mesure de ce que vous prétendez, ajouta-t-il tentant de gagner du temps.
— Précisons que toute offre à une contrepartie, précisa Samaël. On ne traite pas avec le diable sans payer d’une manière ou d’une autre.
— Oh, j’imagine bien, répondit Jack qui s’était dégrisé en un rien de temps. Et parions que le prix c’est mon âme ! ricana à son tour notre loqueteux.
— Entre autre, affirma le diable, accompagnée de quelques menus services. En échange, je te régale tout ce que tu désires. 

En guise de preuve que ce n’était pas une plaisanterie, le Malin se matérialisa en une pièce, sous le nez d’un Jack mi incrédule mi malicieux.

— Vendu, Sam, rit Jack.

Dans sa bourse vide d’argent, Jack conservait chèrement une croix d’argent, précieux souvenir de sa mère bien-aimée. Notre gueux saisit la pièce et l’enferma dans le porte-monnaie, emprisonnant ainsi le diable. Le tavernier avait vu scintiller la pièce et accorda sans hésiter le crédit que Jack lui demanda. 
Jack quitta la taverne l’air guilleret et fier d’avoir ainsi roulé l’être le plus malin au monde. Samaël, emprisonné dans la bourse et en compagnie de la croix, supplia le maréchal-ferrant de l’en sortir. L’homme ne répondit pas, fredonnant même une vielle chanson en reprenant le chemin de sa chaumière. Le diable lui proposa alors de réaliser un de ses vœux.

— Parfait, très cher Samaël. Je vois que tu es plus raisonnable que ta réputation ne le dit. Je te sors de là, si tu me promets de ne revenir que dans un an me réclamer mon âme. C’est une offre décente, ne trouves-tu pas ? Moi, j’ai un sursis et toi tu peux continuer tes petites affaires !
— Offre acceptée, soupira le diable.

L’année passa pour chacun. A la date d’échéance de la promesse, le Malin fut de retour et retrouva notre bon vieux Jack sur une route de campagne. Tous deux n’eurent pas besoin de présentation pour se reconnaître.

— Bonsoir, Jack ! J’ai tenu ma parole et je suis venu réclamer mon dû. Donne-moi ton âme, là et maintenant.

Pendant que le diable parlait, le cerveau de Jack était en ébullition, élaborant un nouveau plan pour déjouer Samaël.

— C’est entendu : une parole est une parole ! Mais avant de partir avec toi, pourrais-tu me cueillir un de ces magnifiques pommes afin que ne m’en aille avec un souvenir alléchant ?

Le diable pris au dépourvu par cette demande incongrue accepta la requête de celui qu’il allait emmener à jamais. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, il fut au sommet de l’arbre. Le maréchal-ferrant, tout aussi prompt, pris son canif et grava une croix sur le tronc de l’arbre, piégeant à nouveau Samaël.

— Beau le paysage de là-haut, mon ami ? demanda avec amusement Jack. 

Samaël fulminait de son perchoir, furieux d’avoir été aussi stupide et d’avoir sous-estimé un humain. La vois de Jack lui parvint :

— Je suppose que tu aimerais descendre, gros malin ? demanda Jack. Allez, avoue !
— Que veux-tu, goujat ? admit Samaël, résigné.
— Libère-moi définitivement de mon pacte et je rabote la croix, lui répondit le petit homme rusé.
Le diable sans aucune défense et admettant au fond de lui qu’il avait perdu, accepta de rompre le pacte.
— D’accord, Jack ! Mais je mets une condition à ta requête.
— Laquelle, demanda le maréchal-ferrant, un tantinet inquiet.
— Si je t’accorde ce que tu me demandes, les portes de mon royaume te seront fermées à jamais !
— Qu’à cela ne tienne, l’affaire est faite, s’empressa d’accepter Jack.

Dès lors, il effaça la croix sur le tronc du pommier et libéra le diable de son perchoir. Les années s’écoulèrent tranquillement pour Jack et vint le jour où, la vieillesse ayant raison de tout humain, il mourut. 
Sa vie peu honorable lui ferma l’entrée du paradis tout comme son accord avec le Diable lui fermait celle de l’Enfer. Toutefois, comme par le passé, notre bon vieux Jack, suivant le principe que, qui ne tente rien n’a rien, entame un marché avec Samaël. Pour une raison que nous ne connaîtrons jamais, le diable fut pris de pitié pour cet humain qui l’avait berné par deux fois. 

— Tiens, voilà un morceau de braise de ma fournaise ! Sers-t’ en pour éclairer ton chemin d’éternel errant ! Par contre, ç’est à mon tour de t’imposer une condition pour que sa flamme ne s’éteigne jamais.
— Je t’écoute, dit Jack.
— Trouve une lanterne pour l’abriter et qu’elle soit suffisante à terrasse de peur toutes les âmes errantes comme la tienne que tu rencontreras. Pour l’instant, je te donne un rutabaga, mais dépêche-toi de trouver mieux car cette lanterne de fortune ne fera pas long feu.
— Qu’il en soit fait selon ta volonté, Samaël, répondit le maréchal errant.

Jack initia son errance, cherchant ce qui ferait l’affaire pour abriter à jamais le morceau de braise car le rutabaga n’effrayait pas du tout les âmes qu’il rencontrait. Il aboutit, dans un jardin où poussaient de superbes citrouilles. Notre infortuné se dit que cela pourrait fonctionner. Hélas, l’effet de la lanterne orange fut exactement le même que celui provoqué par le rutabaga.
Le temps passait et la lanterne se mourrait. Une idée, entre temps faisait son chemin dans le cerveau de Jack. C’est alors qu’il arriva dans un endroit situé entre le monde des vivants et des morts. Il y croisa un jeune homme complètement ivre. Sans bruit, il s’en approcha, et, tirant le couteau qui lui avait servi à créer des ouvertures dans le rutabaga, il lui trancha très lentement la gorge. L’innocente victime se débattait lamentablement, essayant en vain et par tous les moyens de se dégager de son invisible agresseur. Peine perdue, quand on a affaire à un mort. Au bout d’un temps qui fut un délice pour Jack et un supplice pour l’ivrogne, le corps s’affaissa et l’homme rendit l’âme. - A qui, nul ne le sait. –
Le maréchal errant se mit à fignoler son travail. Une seule partie du corps l’intéressait : le crâne ! Quoi de plus parfait comme lanterne : tous les trous nécessaires pour éclairer son chemin, étaient à portée de lame. La braise, elle, faiblissait. Il fallait faire vite. Mais comme les alentours s’assombrissaient, l’âme de Jack en faisait tout autant. Il se mit à dépecer la tête du cadavre avec délectation. Ensuite, il décortiqua toute la chair ne laissant que les muscles. A l’aide de la pointe de son couteau, il ôta les globes oculaires, trancha la langue et fractura la mâchoire qu’il maintint ouverte à l’aide de deux phalanges découpées à la main droite du jeune homme. Satisfait, il admira son travail. La flamme vacilla. Aussitôt, Jack saisit le morceau de braise et le plaça à l’intérieur de sa toute nouvelle lanterne. Vint à passer une âme errante qui poussa un cri d’épouvante avant de se fondre dans la nuit. Jack sut ainsi qu’il avait vu juste. Toutefois, petit à petit, la braise consommait le crâne. La peur de perdre ce qui éclairait son chemin, rendit notre homme de plus en plus cruel. Protégeant son bien de toutes ses forces, il se mit à tuer tout humain se trouvant sur son passage pour en récupérer une lanterne. Depuis son premier crime, Jack s’en va d’un monde à l’autre. Faisant peur à des centaines de milliers d’âmes errantes du côté des morts et des milliers de victimes du côté des vivants. Si vous le connaissez encore sous le nom de Jack ‘O Lantern, c’est que vous êtes encore de ce monde. Mais le jour où vous rejoindrez l’autre, vous n’entendrez plus parler que de ‘Jack aux Cervelles’. Il ne reste qu’à compter sur le jugement dernier où, peut-être, son horrible renommée prendra fin.

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Commentaires
M
Wow ! Digne d'une romancière !
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